Professeur Thierry BOON
Lauréat du Prix Louis-Jeantet de médecine 1994

Les informations ci-après se réfèrent à la date de la remise du Prix.

Citoyen belge, né en 1944, le professeur Thierry BOON est directeur de l’Institut Ludwig de Recherches sur le Cancer, Unité de Bruxelles, et professeur d’immunologie à l’Université catholique de Louvain.

Thierry BOON est un pionnier de l’immunologie des cancers. Il a exploré la réaction du système immunitaire contre des cellules tumorales, réaction mise en oeuvre par des lymphocytes T cytotoxiques et capable de reconnaître et de rejeter une tumeur. Il a démontré l’existence d’antigènes tumoraux à la surface des cellules de cancers spontanés, apparemment incapables de susciter une réponse immune. Cette découverte permet de penser que des approches vaccinales seront un jour efficaces contre certains cancers.

Thierry BOON étudie actuellement l’application clinique chez l’être humain de ces résultats obtenus sur la souris. Ayant d’ores et déjà identifié des antigènes tumoraux spécifiques de mélanomes humains, Thierry BOON est engagé dans des collaborations internationales visant à tester différentes formes de vaccinations contre les mélanomes.

Le Prix Louis-Jeantet de médecine permettra au professeur Thierry BOON de s’associer des collaborateurs à long terme.

Travaux de recherche

C’est à notre système immunitaire que revient le rôle de défendre le corps humain contre les organismes pathogènes qui le menacent. Contre ceux-ci, le système immunitaire aligne principalement deux types d’armes :
– Les anticorps, protéines spécialisées qui reconnaissent les structures étrangères à l’organisme et les désignent à l’attention du système. Grâce aux anticorps, nos défenses immunitaires sont particulièrement efficaces dans la lutte contre les bactéries et virus présents dans le sang et les liquides corporels.
– Les lymphocytes T cytotoxiques : ces cellules spécialisées reconnaissent et tuent les cellules de notre corps qui sont déjà infectées par un virus, prévenant ainsi la propagation ultérieure de l’infection. Les mêmes lymphocytes interviennent dans le rejet des greffes de tissus étrangers.

Le fonctionnement des deux branches du système immunitaire repose sur leur commune capacité à reconnaître des structures moléculaires étrangères au  » soi « . Ces structures appelées antigènes sont en quelque sorte la signature chimique d’un corps étranger, qu’il s’agisse d’une bactérie, d’un virus ou d’une cellule infectée. La vaccination consiste à présenter au système immunitaire l’antigène typique d’un organisme nuisible, mais cela sous une forme inoffensive (inoculation d’un virus inactivé, par exemple). Le système réagit en mobilisant anticorps et lymphocytes T contre cet antigène. De plus, le système garde un  » souvenir  » immunologique de la vaccination, si bien qu’il réagira plus efficacement lorsqu’il sera confronté une seconde fois au même antigène, porté cette fois-ci par l’agent pathogène lui-même.

Contrairement aux bactéries, aux virus ou aux cellules d’un organe greffé, les cellules cancéreuses font partie intégrante de notre  » soi « , de notre propre corps. Comment peut-on alors espérer mobiliser nos défenses immunitaires contre cet ennemi intérieur ? En fait, on soupçonne depuis longtemps que les cellules cancéreuses sont profondément modifiées par rapport à leurs congénères saines et qu’elles nous sont donc devenues étrangères dans une certaine mesure. Malheureusement, notre système immunitaire semble être assez paresseux lorsqu’il s’agit de détecter cette  » étrangeté  » des cellules tumorales. Certes, dans le cas de cancers artificiellement induits chez des souris, on a pu mettre en évidence des antigènes présents à la surface des cellules tumorales et suscitant dans certains cas une réaction de rejet de la tumeur. Mais la mise en évidence d’antigènes tumoraux dans les cancers spontanés de l’homme s’est révélée beaucoup plus difficile.

C’est à cette tâche que s’est attelé Thierry Boon. Prenant acte des échecs de nombreux chercheurs qui avaient tenté d’isoler de tels antigènes directement à partir de cellules tumorales, il opéra un ingénieux détour par le génie génétique. Il mit au point une technique permettant d’identifier non pas directement l’antigène lui-même, mais le gène qui spécifie ce dernier dans l’ADN de la cellule cancéreuse. Ayant validé cette technique sur un modèle animal, il l’utilisa pour identifier les antigènes présents dans certains mélanomes humains (cancers de la peau). Le premier antigène de ce type à avoir été découvert, appelé MAGE-1, est absent des cellules normales mais exprimé sur les cellules tumorales d’environ 30% des patients atteints de mélanome.

L’identification d’un tel antigène tumoral est un premier pas vers une approche vaccinale contre le cancer, approche qui vise à stimuler l’activité des lymphocytes T capables de reconnaître un antigène tumoral présent chez le patient. Certes, la mise au point d’une telle immunothérapie reste un projet de longue haleine. En effet, contrairement à un vaccin classique où la même préparation est administrée à tous les individus, une immunothérapie anticancéreuse devra tenir compte de l’hétérogénéité immunologique des patients. En effet, ce que  » voient  » les lymphocytes T que l’on souhaite stimuler pour qu’ils combattent la tumeur, ce n’est pas l’antigène MAGE-1 tout nu, mais c’est l’antigène en question associé aux molécules du complexe majeur d’histocompatibilité de classe I (MHC-I), qui sont elles-mêmes différentes selon les individus. Néanmoins des études cliniques sont en cours pour valider ce contexte thérapeutique très innovateur.

Prof. Thierry Boon-Falleur
Directeur
Institut Ludwig pour la recherche sur le cancer
UCL 7459
avenue Hippocrate, 74
B – 1200 Bruxelles

Tél. : +32 2 764 75 80
Fax: +32 2 764 75 90

Site Internet: 
Ludwig Institute for cancer Research