Professeure Nicole LE DOUARIN
Lauréate du Prix Louis-Jeantet de médecine 1990

Les informations ci-après se réfèrent à la date de la remise du Prix.

De nationalité française, née en 1930, la professeure Nicole LE DOUARIN dirige l’Institut d’embryologie cellulaire et moléculaire du CNRS et du Collège de France à Nogent-sur-Marne.

La professeure Nicole LE DOUARIN est à l’origine de progrès fondamentaux dans l’embryologie du système nerveux et du système immunitaire des vertébrés. Pionnière de la méthode des greffes sur embryons de caille et de poulet, elle a en particulier mis en évidence la migration au cours du développement des cellules de la crête neurale, ainsi que l’importance des signaux chimiques auxquels ces cellules sont exposées, signaux qui déterminent en partie leur destination finale.

Récemment la professeure Nicole LE DOUARIN a démontré le transfert de certains traits comportementaux entre la caille et le poulet par transplantation, chez l’embryon, d’éléments du système nerveux. Ces résultats renouvellent profondément la problématique des territoires cérébraux et de leur mise en place au cours du développement.

La professeure Nicole LE DOUARIN utilisera le Prix Louis-Jeantet de médecine pour acquérir, entre autres, un équipement de microscopie confocale permettant d’obtenir des images à haute résolution à partir de sections de tissu particulièrement minces.

Travaux de recherche

Comprendre comment une cellule unique, l’oeuf fécondé, donne naissance à une grande diversité de types de cellules, fonctionnant comme un tout intégré : c’est là l’ambition de la biologie du développement.

A une phase de prolifération des cellules de l’embryon, s’ajoutent bientôt des processus de différenciation cellulaire, qui confèrent aux cellules leur identité. En effet, s’il est vrai que le programme génétique contenu dans chaque cellule est identique, celui-ci est mis en oeuvre de façon différente suivant que le destin de la cellule concernée est de devenir neurone, fibroblaste, globule rouge, etc.

En étroite liaison avec la différenciation se produisent des migrations, qui font que la plupart des cellules traversent une série d’environnements différents. Les cellules échangent ainsi des signaux chimiques divers, qui jouent un rôle fondamental dans la détermination de leur destinée finale.

Nicole Le Douarin a révolutionné notre compréhension de ces phénomènes grâce à ses travaux sur les embryons de poulet et de caille. En effet, il est possible d’échanger desgreffons entre embryons de ces deux espèces sans déranger le développement embryonnaire. En d’autres termes, on peut par exemple échanger entre un embryon de caille et de poulet de même âge un fragment de l’ébauche de tel ou tel organe. On obtient ainsi des embryons (et poussins) dits chimériques, c’est-à-dire  » hybrides  » au niveau de tel ou tel tissu. De plus, comme les cellules de caille restent identifiables au cours de leur développement ultérieur, grâce à un  » marqueur  » morphologique qui leur est propre, il est facile de les reconnaître au microscope, ce qui permet de repérer le trajet suivi par les cellules de caille au cours de l’embryogenèse du poulet.

Cette particularité morphologique a été brillamment utilisée par Nicole Le Douarin dans nombre de travaux visant à élucider les migrations et interactions cellulaires intervenant dans la mise en place des divers tissus et organes. Nous ne mentionnerons que deux d’entre eux : les dérivés de la crête neurale et le cerveau.

La crête neurale est une structure éphémère située de part et d’autre de l’ébauche première du système nerveux central, ébauche qui porte le nom de tube neural. Les cellules de la crête neurale jouent un rôle primordial dans le développement embryonnaire car elles sont à l’origine de nombreuses structures importantes et en premier lieu dusystème nerveux périphérique. Après migration, elles donnent naissance aux types cellulaires suivants (la liste est loin d’être exhaustive) :
– les neurones du système nerveux autonome (sympathique et parasympathique) et des ganglions sensoriels, ainsi que les cellules gliales qui les accompagnent ;
– les cellules de la glande surrénale produisant de l’adrénaline ;
– des cellules pigmentaires, présentes au niveau de l’épiderme ;
– certaines parties du squelette et du tissu conjonctif de la tête.

Les expériences de Nicole Le Douarin ainsi que celles d’autres chercheurs ont permis de mettre en évidence plusieurs  » chemins  » parcourus par les cellules de la crête neurale en fonction de leur destination finale. Avant leur migration, ces cellules sontpluripotentielles, c’est-à-dire que leur destin n’est pas déterminé. Le micro-environnement qu’elles traversent joue un rôle important dans la fixation de leur identité définitive.
Grâce au succès de ces travaux, la chasse aux facteurs biochimiques responsables de ces effets est désormais ouverte.

Nicole Le Douarin et son équipe ont étendu ce type d’expériences au système nerveux central et produit, toujours par greffe sur les embryons, des chimères caille-poulet dont le cerveau est composite. Le but de ces expériences est de mieux comprendre la migration des neurones dans le cerveau en formation. De plus, le comportement des poussins chimériques apporte des renseignements intéressants. C’est par exemple le cas du  » cri juvénile « , un comportement nettement distinct chez les jeunes poussins de caille et de poulet et qui ne dépend d’aucun apprentissage par imitation. Les chercheurs ont montré que chez les poussins chimériques, le caractère  » caille  » ou  » poulet  » du cri dépend de l’origine de certaines parties du cerveau. Ainsi, un poussin de l’espèce  » poulet  » dont le cerveau provient pour certaines parties de l’espèce  » caille  » crie comme une jeune caille ! Ces découvertes renouvellent de façon très suggestive le problème des localisations cérébrales, ainsi que de leur mise en place au cours du développement.

Prof. Nicole Le Douarin
Directeur
Institut d’embryologie cellulaire et moléculaire du CNRS et
du Collège de France
UPR 9064
Avenue de la Belle Gabrielle, 49 bis
F – 94736 Nogent-sur-Marne Cedex

Tél.: +33 1 45 14 15 15
Fax: +33 1 48 73 43 77

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Institut d’embryologie cellulaire et moléculaire du CNRS et du Collège de France