Professeur Richard PETO
Lauréat du Prix Louis-Jeantet de médecine 1997

Les informations ci-après se réfèrent à la date de la remise du Prix.

De nationalité britannique, né en 1943, Richard PETO est titulaire de la chaire ICRF (Imperial Cancer Research Fund) en statistique médicale et épidémiologie au département de médecine Nuffield à l’Université d’Oxford.

Pionnier de l’épidémiologie, Richard PETO a apporté une contribution décisive à la méthodologie des essais cliniques et à l’investigation des facteurs de risque cardiovasculaire et cancéreux, en particulier ceux liés au tabac et à l’alimentation. Des travaux essentiels, commencés en collaboration avec Richard Doll et d’autres chercheurs, lui ont permis d’apporter des preuves définitives de l’énorme préjudice sanitaire causé par le tabac dans le monde et d’influencer les politiques de santé publique en la matière. Les améliorations qu’il a apportées aux méthodes de la recherche clinique, en collaboration avec Rory Collins, mettant l’accent sur la nécessité d’essais cliniques à grande échelle et sur la méta-analyse d’essais préalables, ont conduit à de nombreux résultats essentiels pour la pratique médicale. Parmi les études cliniques dirigées par Richard PETO et ses collaborateurs, la méta-analyse a permis de prouver les effets bénéfiques de l’aspirine contre les maladies cardiovasculaires, ainsi que l’efficacité de la thérapie adjuvante par le tamoxifène contre le cancer du sein.

Le Prix Louis-Jeantet de médecine permettra à Richard PETO de mettre sur pied un projet de recherche en Inde, visant à évaluer les moyens de combattre certains parasites intestinaux qui contribuent à compromettre l’état nutritionnel des jeunes enfants et leur résistance aux maladies.

Travaux de recherche

Pour la médecine scientifique, l’évaluation rigoureuse des traitements et des interventions sanitaires qu’elle propose est une exigence fondamentale. Cet impératif est à la fois scientifique, éthique et économique. En ces temps où les coûts de la santé pèsent de plus en plus lourdement sur les individus et les collectivités, il est plus que jamais nécessaire de pratiquer une médecine basée sur les preuves (evidence-based medicine). Cependant, comme chaque patient est différent et qu’il n’est donc pas possible de reproduire mécaniquement un effet thérapeutique, les preuves à l’appui d’un traitement ne peuvent être que statistiques et doivent être fondées sur un nombre important d’observations soigneusement planifiées. C’est dire le rôle central d’essais cliniques randomisés à grande échelle, conçus de façon à fournir des renseignements statistiques dûment validés. Statisticien de formation, Richard Peto a apporté des amélioration décisives à la planification, la conduite et l’analyse des essais cliniques, ce qui a permis d’apporter des réponses claires à de nombreuses questions médicales importantes.

L’apport de Richard Peto n’est pas uniquement méthodologique car il a contribué directement à plusieurs grands essais cliniques, avec des répercussions majeures sur le traitement de certaines maladies courantes. D’autre part, ses travaux épidémiologiques ont permis de réévaluer certaines causes majeures de morbidité et de mortalité au niveau mondial. En particulier, ses analyses ont permis de mesurer l’étendue des dommages sanitaires liés au tabac. A titre d’exemple, nous présentons brièvement trois domaines où la contribution de Richard Peto a été essentielle à la fois sur le plan méthodologique et par l’importance intrinsèque des résultats scientifiques obtenus.

Traitement de l’infarctus du myocarde :
Quel est le traitement de choix à utiliser chez un patient qui vient de subir un infarctus du myocarde ? C’est la question posée par une série d’essais cliniques internationaux menés dans une trentaine de pays et connus sous l’acronyme d’ISIS (International Studies of Infarct Survival). Ces essais dans lesquels Richard Peto et son collègue Charles Hennekens ont joué un rôle central ont mis en lumière les bénéfices thérapeutiques de la streptokinase et de l’aspirine dans le traitement de l’infarctus aigu et la prévention des récidives. En particulier, l’essai ISIS-2, mené sur 17’000 patients démontra que la streptokinase et l’aspirine sont chacune responsable d’une réduction de la mortalité d’environ 20%, tandis que l’association des deux médicaments entraîne une réduction de la mortalité qui dépasse 40%. Le changement d’attitude thérapeutique provoqué par la publication de ces résultats a d’ores et déjà permis d’éviter des dizaines de milliers de décès prématurés.

Traitement du cancer du sein :
Un des problèmes majeurs de la recherche clinique est que de nombreux essais cliniques sont de taille insuffisante (impliquant un nombre de patients trop petit) et ne permettent en définitive pas de tirer des conclusions claires. Peut-on  » sauver  » les données ainsi accumulées en agrégeant les résultats de plusieurs essais similaires ? Cela pose des difficultés méthodologiques considérables. Il n’en reste pas moins que, sous certaines conditions, il est possible de faire une analyse globale de plusieurs essais cliniques et d’en tirer des renseignements fiables, alors même que chaque essai pris séparément n’est pas totalement concluant. Cette procédure appelée méta-analyse a été appliquée avec succès par Richard Peto dans le cas du traitement du cancer du sein par le tamoxifène. Son analyse d’un grand nombre d’essais cliniques préalables concernant un total de 100’000 patientes a permis de mettre en évidence l’efficacité du tamoxifène et d’ajuster les attitudes thérapeutiques en conséquence.

La pandémie de pathologies liées au tabac :
Les premières preuves du lien entre le tabac et la mortalité due au cancer du poumon datent des années cinquante, grâce aux travaux d’Austin Bradford Hill et de Richard Doll. Ces premiers travaux furent rapidement suivis par des études prospectives chez les médecins britanniques fumeurs et non-fumeurs, études qui ont élargi le spectre des pathologies dues au tabac (maladies cardio-vasculaires, bronchite chronique, pathologies thromboemboliques). Les analyses de Richard Peto on pris le relais de ces travaux initiaux et ont montré que la pandémie des maladies dues au tabac était encore plus grave que ce que laissaient soupçonner les premières études. Dans les années 80 et 90, la proportion de morts prématurées chez les fumeurs par rapport aux non-fumeurs n’a fait qu’augmenter et il apparaît désormais que la moitié des fumeurs décédés avant d’atteindre le troisième âge sont en fait tués par le tabac. De plus, si la pandémie commence à se stabiliser chez les hommes des pays développés, elle est en plein progrès chez les femmes et dans les pays du Tiers-Monde, où elle pourrait bien engendrer une catastrophe sanitaire. C’est d’ailleurs sur les pays en voie de développement que Richard Peto concentre désormais ses efforts. Il s’agit là d’un énorme défi de santé publique, car on sait les efforts déployés par l’industrie du tabac pour s’ouvrir de nouveaux marchés dans ces pays (on notera que cette industrie dépense annuellement 5 milliards de dollars pour la publicité et la promotion de ses produits dans le monde).

Prof. Richard Peto
University of Oxford
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