Professeur Björn DAHLBÄCK

Lauréat du Prix Louis-Jeantet de médecine 1996

Biographie

Les informations ci-après se réfèrent à la date de la remise du Prix.

Citoyen suédois, né en 1949, Björn DAHLBÄCK est professeur à l’Université de Lund (Suède) et dirige le laboratoire de la coagulation sanguine de l’Hôpital Général de Malmö.

Les travaux de Björn DAHLBÄCK portent sur la coagulation sanguine et en particulier sur le rôle anticoagulant de la protéine C. Formulant l’hypothèse que de nombreuses thromboses sont dues à un dysfonctionnement de cette protéine, il a pu démontrer l’existence d’une anomalie génétique dans des familles présentant une fréquence élevée de thromboses. Cette anomalie très répandue, due à une mutation dans le gène du facteur V, entrave le fonctionnement correct de la protéine C dans le maintien du délicat équilibre biochimique destiné à empêcher la formation intempestive d’un caillot sanguin. Cette découverte, ainsi que le test ingénieux mis au point par Björn DAHLBÄCK constituent un progrès important dans le domaine de la coagulation. Ce progrès a eu des conséquences majeures, non seulement sur le plan des connaissances fondamentales, mais aussi pour la prévention et le traitement des thromboses veineuses et des embolies pulmonaires, pathologies qui sont à l’origine d’une morbidité et d’une mortalité considérables.

Le Prix Louis-Jeantet de médecine permettra à Björn DAHLBÄCK de s’adjoindre des collaborateurs supplémentaires pour poursuivre ses recherches cliniques et biochimiques.

Travaux

Travaux de recherche

Lorsqu’une blessure saigne, un caillot arrête aussitôt l’hémorragie. Chacun a pu faire l’expérience de ce mécanisme biologique fondamental qu’est l’hémostase, mécanisme nécessaire à la survie et qui repose sur la coagulation sanguine. Son importance apparaît clairement si l’on considère le caractère très invalidant de l’hémophilie, où l’une des protéines du système de la coagulation fait défaut et la capacité à arrêter un saignement est donc diminuée. Il existe aussi d’autres pathologies – en fait plus fréquentes – où la coagulation fonctionne  » trop bien « , ce qui conduit à la formation intempestive de caillots et donc à des thromboses et à des embolies.

La coagulation sanguine résulte d’une cascade de réactions biochimiques impliquant un grand nombre de facteurs protéiques et plusieurs types de cellules du sang. C’est la complexité du système et le grand nombre d’interactions activatrices ou inhibitrices entre ses constituants qui permettent un réglage très fin de l’équilibre entre forces procoagulantes et anticoagulantes. En effet, en l’absence de lésion d’un vaisseau sanguin, la position d’équilibre du système est du côté anticoagulant, car il s’agit de maintenir la fluidité et la circulation du sang. Par contre, à l’endroit où un vaisseau est blessé et où il y a saignement, les activités procoagulantes prennent localement l’avantage pour permettre la formation d’un caillot, mais sans affecter le flux sanguin ailleurs que sur le lieu même de la lésion.

Björn Dahlbäck a découvert comment ce système en équilibre instable est pris en défaut chez les personnes souffrant de certaines thromboses familiales. La tendance, chez des personnes apparentées, à faire facilement des thromboses, est en effet un type de pathologie assez fréquent. Chaque année, près d’une personne sur mille est victime d’une thrombose veineuse et si l’importance des facteurs génétiques dans ces thromboses est depuis longtemps reconnue, les anomalies génétiques identifiés jusqu’alors ne permettaient de rendre compte que d’une petite minorité de ces thromboses familiales. Björn Dahlbäck a montré que la majorité de ces situations sont dues à une résistance héréditaire à la protéine C activée. Pour comprendre la nature et la portée de cette découverte, il faut considérer les interactions mutuelles entre trois composants du système de la coagulation : la thrombine, la protéine C et le facteur V (cinq).

D’un côté, la thrombine est un facteur procoagulant essentiel puisque cette enzyme s’accumule sur le site d’une lésion vasculaire et catalyse la formation de fibrine, constituant majeur du caillot. Mais la thrombine est en fait une protéine à double visage puisqu’en l’absence de lésion, elle joue un rôle opposé et intervient dans un mécanisme anticoagulant. En liaison avec la thrombomoduline, présente à la surface des cellules de la paroi du vaisseau sanguin, la thrombine active la protéine C. Une fois activée, la protéine C inactive à son tour le facteur V, qui est nécessaire à la coagulation (voir schéma). La protéine C activée (APC) fait donc partie de la branche anticoagulante du système et son importance apparaît clairement si l’on considère les conséquences d’une déficience complète de protéine C chez un individu. En effet, une telle déficience provoque des accidents thrombo-emboliques très graves dès la naissance.
Les thromboses familiales dont Björn Dahlbäck a élucidé le mécanisme ne sont pas dues à une déficience en APC, mais au fait que chez ces patients le système de la coagulation résiste à l’action anticoagulante de l’APC. Le facteur V est anormal en ce qu’il n’est plus susceptible d’être inactivé par l’APC. De ce fait, une partie essentielle des mécanismes procoagulants est en quelque sorte bloquée en position  » enclenchée « , ce qui explique la tendance aux thromboses de ces patients. De plus, et grâce en particulier aux travaux de Rogier Bertina (Leyde), il s’avère que dans plus de 90% de ces situations de résistance génétique à l’APC, la cause est une mutation du 506è acide aminé de la chaîne polypeptidique du facteur V : à cette position l’arginine est remplacée par la glutamine, ce qui n’entrave pas l’activité procoagulante du facteur V mais le rend insensible à l’inactivation par l’APC. Cette mutation du gène spécifiant le facteur V est étonnamment fréquente, tout au moins dans les populations européennes.

Cette découverte, ainsi que le test d’identification de la résistance à l’APC mis au point par Björn Dahlbäck ont eu des retombées considérables à la fois pour le traitement des pathologies thrombo-emboliques et pour identifier les patients à risque. De plus, l’existence d’une mutation pathologique aussi commune pose un problème de génétique des populations fascinant : cette mutation comporte-t-elle un bénéfice caché qui expliquerait qu’elle n’ait pas été éliminée par la sélection naturelle?

Ce schéma est simplifié : en particulier, il ne montre ni la voie procoagulante des facteurs VII à XI, ni le mécanisme anticoagulant dépendant de l’antithrombine.

Contact

Prof. Björn Dahlbäck
Lund University
Department of clinical Chemistry
Universtity Hospital
S – 205 02 Malmö

Tél. : +46 40 33 15 01
Fax : +46 40 33 70 44

E-mail: bjorn.dahlback@klkemi.mas.lu.se

Site Internet: 
Lund University, Department of clinical Chemistry